* Espion(s)

Publié le par 67-ciné.gi-2009











Espion(s) espionnage de Nicolas Saada


















avec :
Guillaume Canet, Géraldine Pailhas, Stephen Rea, Hippolyte Girardot, Archie Panjabi, Vincent Regan, Alexander Siddig, Jamie Harding, Hiam Abbass, Bruno Blairet, Fred Epaud, Michael Marks, Alexandre Steiger, Sebastien Cardinal, Tarek Khalil, Satya Dusaugey, Julien Meunier et Milanka Brooks


durée : 1h39
sortie le 28 janvier 2009

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Synopsis
Jeune homme brillant, Vincent n’a pourtant pas suivi la voie royale que lui offraient ses études. Il travaille dans un aéroport, au centre de triage des bagages. Alors que son collègue Gérard fouille une valise diplomatique, il est tué par l’explosion d’un flacon de parfum. Vincent surprend son propriétaire, un Syrien, en train de récupérer le sac. La Dst le contraint à accepter un marché : en échange de sa collaboration avec les services secrets français et anglais pour retrouver les hommes impliqués dans l’explosion, il ne sera pas poursuivi pour les vols commis dans le centre de triage. L’enquête conduit Vincent à Londres, où il doit se rapprocher d’un homme d’affaires anglais, Peter Burton, lié aux agents syriens. La Dst et le Mi5 suggèrent à Vincent de séduire l’épouse de Burton, Claire, une Française au caractère fragile, pour la manipuler et l’amener à trahir son mari. Destabilisé par les enjeux de la mission, Vincent va être rattrapé par ses sentiments.


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Entretien avec Nicolas Saada
- : « Quelle a été l’origine du film ? »

Nicolas Saada : « L’envie de raconter une histoire sentimentale au coeur d’un film de genre. Je tenais aussi à ce que l’intrigue se déroule dans un pays étranger afin de ne pas me retrouver coincé par les conventions du film de genre à la française. Je me suis inspiré de l’arrestation d’un groupe de voleurs de bagages à Roissy en novembre 2004. J’ai alors imaginé qu’un de ces voleurs se retrouve au coeur d’une conspiration. Par un hasard incroyable, des bagagistes ont de nouveau été arrêtés à Roissy à peine un mois après la fin du mixage du film ! La réalité rattrape la fiction, comme souvent. »

- : « Les deux dimensions, l’histoire sentimentale et le récit d’espionnage se mêlent très intimement... »

Nicolas Saada : « Ce film est d’abord une histoire d’amour sur fond d’espionnage. Je l’ai écrit dans ce sens, pour raconter à travers les personnages. Le plus difficile, c’est de garder ce point de vue jusqu’au bout tout en respectant certaines conventions propres au genre. Dans tout film de genre, il y a des scènes à faire et j’ai essayé de respecter ce cahier des charges. J’aime les récits d’espionnage parce qu’ils concernent toujours la manipulation, les faiblesses humaines, la fragilité qu’il y a en chacun de nous. »

- : « Votre film est aussi un récit d’initiation, sur un jeune homme qui se retrouve embarqué dans une histoire trop grande pour lui... »

Nicolas Saada : « Vincent est au début une sorte d’ermite, un type brillant, mais complètement refermé sur lui-même. À travers cette expérience du danger, il change complètement de vie, mais il remet aussi en question sa vision du monde, plutôt individualiste. Il a tout pour réussir mais il est pessimiste et pense que le monde va à sa perte, qu’il n’y a rien à faire. Il n’a pas d’idéal. Progressivement, la nature des événements auxquels il est exposé, la cruauté du dispositif qu’il met en place, commencent à l’affecter. Effectivement Espion(s) peut être vu comme un récit d’initiation, celui de Vincent mais aussi celui de Claire... »

- : « Quels modèles aviez-vous à l’esprit avant de commencer à tourner ? »

Nicolas Saada : « Ils étaient nombreux. Malgré un budget confortable, Espion(s) ne peut en rien rivaliser avec les très grosses productions comme La mort dans la peau. Nous avons tourné la scène du métro en une journée par exemple, à une caméra. Il fallait styliser au maximum la mise en scène. Disons que j’ai essayé de jouer en permanence sur deux registres : celui psychologique du cinéma français classique, et celui plus direct, plus émotionnel du cinéma anglo-saxon. »


- : « Avez-vous effectué des recherches avant d’entreprendre l’écriture du scénario ? »

Nicolas Saada : « J’ai lu plusieurs ouvrages sur la Syrie, j’ai aussi fait des recherches sur l’hypothèse d’un explosif liquide utilisé à des fins terroristes. C’était en mars 2006. L’été suivant on interdisait l’embarquement de produits liquides sur les vols à cause d’une alerte majeure en Grande-Bretagne : plusieurs individus avaient tenté d’embarquer de l’explosif liquide dans des vols long courrier. Le souci de ce genre d’explosifs liquides c’est qu’ils peuvent devenir avec le temps indécelables, c’est-à-dire incolore et inodore. Le nitrométhane n’est heureusement pas aussi volatil que ce que l’on voit dans le film, mais il est probable que, très bientôt, on arrive à le raffiner pour qu’il ait la rapidité de la nitroglycérine. »

- : « Vous avez rencontré des spécialistes du monde de l’espionnage ? »

Nicolas Saada : « J’ai parlé avec quelqu’un de la manière dont on gère aujourd’hui les sources, ces individus infiltrés qui travaillent pour les services secrets sans être pour autant des agents, ce sont des pigistes... Ces entretiens m’ont aussi aidé à construire un style visuel avec quasiment pas de gadgets ou de haute technologie. Tous les spécialistes du renseignement ont le même discours aujourd’hui : c’est le renseignement humain qui prime sur le reste, et une source est plus précieuse que le plus sophistiqué des satellites espions. Cette personne m’a aussi raconté qu’il arrivait que certaines sources pètent les plombs et prennent des initiatives sans qu’on leur demande... Je me suis aussi posé beaucoup de questions sur la fameuse filière diplomatique, un monde parallèle qui peut permettre à des états voyous ou à ses représentants d’en profiter. Dans le film, on ne sait jamais si Malik est une sorte de free lance ou s’il obéit à des ordres. Quand j’ai demandé à ce contact s’il n’y avait pas un risque qu’un jour la filière diplomatique soit utilisée à des fins terroristes, il m’a répondu qu’il préférait ne pas y penser... J’ai aussi lu l’autobiographie de Stella Rimington Open Secret, la patronne du Mi5 entre 1992 et 1996. C’est un livre très précis, qui décrit le quotidien de l’agence avec beaucoup de détails, en accentuant le côté vie de bureau de l’institution, comme dans les romans de Le Carré. Elle raconte très bien comment elle devait gérer des situations extrêmes où se mêlaient son travail et son quotidien. Cette lecture m’a conforté dans ma décision de valoriser les personnages plutôt que la technologie. »

- : « Comment s’est passé le tournage à Londres ? »

Nicolas Saada : « Nous avions en tout quarante jours de tournage : cinq semaines à Paris et trois à Londres. Le tournage a été difficile parfois, fatigant souvent. Le problème d’un tournage à Londres, c’est d’abord la logistique et les repérages : chaque quartier a son borough et on doit passer par le borough pour obtenir les autorisations. Comme nous nous déplacions en permanence, les choses étaient compliquées. Nous tournions le plus souvent à une seule caméra, ce qui nécessitait d’enchaîner les scènes le plus rapidement possible, et nous perdions la lumière à 16 heures. L’autre difficulté venait de diriger ce film en deux langues, avec deux équipes, en essayant de garder un ton homogène, cohérent. »

- : « Comment avez-vous choisi les acteurs ? »

Nicolas Saada : « Guillaume Canet s’est imposé d’emblée pour le rôle de Vincent. Il a une manière unique d’«attraper» le cadre. C’est un acteur très cinégénique, qui peut exprimer beaucoup dans les silences, les regards. Le personnage a immédiatement pris corps avec lui. Il aimait le pari physique du film, l’idée de se transformer d’un personnage à un autre. Il a été d’un grand soutien. Sans lui, Espion(s) n’aurait jamais vu le jour. J’avais travaillé avec Géraldine Pailhas pour mon court métrage, Les parallèles, en 2004. Je voulais construire un film autour d’elle, à partir d’un personnage de femme blessée, solitaire. Il fallait une actrice subtile, capable de laisser le film dévoiler le personnage de Claire peu à peu. Quant à Hippolyte Girardot, il incarne à mes yeux une élégance et un cynisme qui correspondaient parfaitement au personnage de Simon. Il est très direct et paradoxalement très opaque : idéal pour un film d’espionnage. »

- : « Comment s’est passé le casting des acteurs anglais ? »

Nicolas Saada : « Miraculeusement ! Pour le personnage de Malik, j’ai tout de suite pensé à Alexander Siddig, qui m’avait impressionné dans Syriana. Nous nous sommes vus une fois, et très vite nous nous sommes mis d’accord sur ce que devait être Malik : un personnage ambigu, séduisant, pas du tout fanatique ou nerveux. Il a construit son personnage de façon très vivante, avec une force incroyable de proposition. J’ai découvert Archie Panjabi pour la première fois dans The constant gardener, puis dans Un coeur invaincu. On lui a envoyé le scénario et elle a tout de suite manifesté son intérêt. Dans le film, elle incarne un courant contemporain en Angleterre : beaucoup de citoyens britanniques d’origine indienne ou pakistanaise ont choisi d’entrer dans les institutions comme la justice ou la police. Archie apporte au personnage d’Anna des nuances que je n’imaginais pas au départ. J’avais vu Stephen Rea dans les films de Neil Jordan et j’avais été frappé par son rôle dans La fin d’une liaison. Il était aussi formidable dans V pour vendetta. Il était le Palmer idéal : bougon, presque démodé, et au fond, très émouvant. Physiquement, il me fait penser à un ours. Derrière le calme, il y a quelque chose en lui d’assez imprévisible. Le casting du personnage de Peter, le mari de Claire, était un vrai casse-tête. On entre dans une nouvelle ère en Grande-Bretagne : beaucoup de golden boys n’ont pas suivi le parcours traditionnel avec études à Oxford ou Cambridge. Ils sont issus de la classe moyenne, et ont commencé à travailler jeunes. Peter incarne cette génération de nouveaux riches. Gail Stevens, la directrice de casting anglaise m’a conseillé de rencontrer Vincent Regan, que je ne connaissais pas. Tout de suite, j’ai été frappé par sa culture, sa vision extrêmement pertinente du scénario et du personnage. Peter est un rôle ingrat, difficile : c’est un homme manipulé, dépressif, mais qui aime sincèrement sa femme. On ressent une empathie pour lui, que Vincent fait superbement passer. »


- : « Comment avez-vous choisi l’équipe avec laquelle vous avez travaillé ? »

Nicolas Saada : « J’avais été très impressionné par le travail du directeur de la photographie Stéphane Fontaine pour Léo (en jouant dans la compagnie des hommes) d’Arnaud Desplechin, et De battre mon coeur s’est arrêté de Jacques Audiard. Il aimait le pari du film, l’enjeu formel qu’il représentait. Il m’a prévenu que le tournage ne serait pas une mince affaire, à cause de la multiplicité des décors, du fait de travailler dans deux pays, de la complexité de certaines scènes. Sur le plateau il s’est révélé un allié essentiel. Nous avons bâti le style visuel du film ensemble, en relation constante avec Thierry François, le décorateur, et Caroline de Vivaise, la costumière. »

- : « Et pour la musique ? »

Nicolas Saada : « J’avais besoin d’un vrai «score», une bande originale à la fois élégante, oppressante, qui ne soit ni une copie, ni un décalque. La démarche de Cliff Martinez pour L’anglais et Solaris de Soderbergh m’avait toujours intéressé. Il associe des compositions très climatiques à une approche classique de la musique de film. Il est sans doute un des compositeurs les plus talentueux en activité aujourd’hui. Je l’ai approché sans vraiment être sûr qu’il accepterait. Il a dit oui très vite : nous avons travaillé sans relâche, scène après scène, thème après thème. À l’arrivée, c’est une musique de film idéale : moderne, impressionniste et très efficace. »

- : « Votre passé de critique de cinéma a-t-elle une influence sur votre travail de cinéaste ? »

Nicolas Saada : « C’est un tout : la critique, l’expérience pendant sept ans avec Pierre Chevalier à Arte, l’écriture de scénarios, la radio... Chacune de ces étapes m’a aidé à me construire, et à relier mon regard amoureux sur le cinéma à une connaissance très concrète de la production. Mon travail de critique m’a permis d’acquérir une culture de cinéma assez étendue. J’ai développé un rapport assez concret aux films que j’ai vus ou que je revois : souvent je me pose des questions très pratiques en les regardant : où est placée la caméra ? Pourquoi deux axes plutôt qu’un ? Etc... »


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Fiche technique
Réalisateur : Nicolas Saada
Scénariste : Nicolas Saada
Chef opérateur : Stéphane Fontaine Afc
Ingénieur du son : Cyril Moisson
Musique originale : Cliff Martinez
Supervision musicale : Matthieu Sibony
Montage image : Juliette Welfling
Montage son : Philippe Heissler et Thomas Robert
Chef décorateur : Thierry François
Costumes : Caroline de Vivaise
Coiffeur : Gérald Portenart
Maquilleuse : Laurence Grosjean
Directrice de casting : Antoinette Boulat et Gail Stevens
Régisseur général : Marie-Hélène Labret
1er assistante réalisateur : Emilie Cherpitel
2ème assistant réalisateur : Elliot Matthews
1er assistant opérateur : Matthieu Le Bothlan
2ème assistant opérateur : François Gallet
Scripte : Marie leconte
Assistante montage : image Margot Meynier
Chef constructeur : Laurent Hottois
Chef électricien : Michel Sabourdy
Chef machiniste : Antonin Gendre
Producteur : Michael Gentile
Coproducteur (UK) : Bertand Faivre
Directeur de production : Jacques Royer
Administrateur de production : Arnaud Plé
Directeur de post-production : Abraham Goldblat
Producteurs associés : The Gang Productions et Rocky Chignolle
Une coproduction : The Film, Studio 37, Mars Films et France 2 Cinéma
Avec la participation de : Canal+ et de Cinécinéma
Avec le soutien de : la Région Ile-de-France
En partenariat avec : le CNC
Ventes internationales : Studio 37 / Kinology

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présentation réalisée avec l’aimable autorisation de

remerciements à
Stéphane Célérier

logos, textes & photos © www.marsdistribution.com

Publié dans PRÉSENTATIONS

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